Une vie entre régions sauvages et cultivées

Walter Hunkeler a utilisé souvent sa tête dans sa jeunesse. La décision de mettre plus à contribution coeur et main l’a non seulement amené aux Grisons, mais aussi donné l’idée des produits SOGLIO

Nous sommes au début de l’après-midi, le ciel au-dessus de Soglio est chargé de nuages. Malgré cela, un poignée de touristes a trouvé le chemin du petit village du Val Bregaglia, où habite Walter Hunkeler. Celui-ci ne se laisse pas troubler par le temps maussade, il traverse d’un bon pas le petit village à l’atmosphère méditerranéenne en saluant les gens au passage. Son but: son jardin, dans lequel murissent les fruits du travail d’une vie.

Walter Hunkeler au magasin de la manufacture SOGLIO à Castasegna.

Le natif de Bâle vit et travaille à Soglio avec son épouse Sonja depuis 1975. « A Bâle, j’ai travaillé comme microbiologiste, à la fin dans un institut de recherches immunologiques renommé. » Ce travail était, pour Hunkeler, trop éloigné de la vraie vie, et, tout à fait dans l’esprit de renouveau des années 70, lui et son épouse ont cherché un endroit et une activité plus près de cette « vraie vie ». « Pour moi il était clair que l’homme, dans sa totalité aux structures multiples, représente plus que ce dont il se croit capable. En outre, j’ai toujours aimé la montagne et le travail manuel, ce qui, finalement, m’a amené à Soglio et m’y a fait rester. » Soglio représente quelque chose de spécial: « C’est un mélange de rigueur nordiste et de charme sudiste, de culture occidentale et de sagesse orientale. » Avant tout, les gens sont encore proches de la nature, ce qui n’est pas évident aujourd’hui. « Des personnes possédant véritablement un sens intime de la nature et qui l’appréhendent avec leurs sens ne sont plus si nombreuses », regrette Hunkeler.

«Nous faisons partie de ce monde, partie de la nature, nous n’y sommes pas à côté, mais en plein milieu.»

La chimie fait partie de la nature

UC’est ainsi qu’il explique son environnement contemporain et son jardin, qui fournit les ingrédients pour les produits SOGLIO, ce qui éclaire ce propos. « Nous faisons partie de ce monde, partie de la nature, nous n’y sommes pas à côté, mais en plein milieu».

En route pour aller chercher ses moutons, Walter Hunkeler s’arrête fréquemment. Il montre des fleurs, des insectes, indique leur nom, leur rôle ou leur composants. Millepertuis, Achillée, Zygènes…»Le zygène se protège des prédateurs en secrétant du cyanure d’hydrogène, c’est de la chimie», raconte le biologiste. C’est pourquoi il ne comprend pas qu’autant de personnes s’emportent sur le fait qu’un nom chimique se retrouve sur un produit. « L’homme possède un esprit qu’il utilise pour trouver et développer de bonnes choses. Mais à partir de là, celles-ci ne sont plus considérées comme naturelles.» Sans l’homme, d’après Hunkeler, il y aurait beaucoup moins d’espèces animales et végétales à Bergell: « la colonisation du milieu alpin par l’homme a été un bénéfice écologique.» Le défrichement des forêts a créé des espaces ouverts, donnant ainsi de la place à de nouvelles espèces – la diversité biologique est liée à la culture, donc à l’action de l’homme. «Ici, en haut, nous vivons entre régions sauvages et cultivées, partout sont renards, chevreuils, cerfs et martres, même dans le village.»

Cette philosophie se retrouve dans tous les produits SOGLIO, à commencer par le premier, «Sogliosan». «Un jour, il nous a fallu réfléchir à ce dont nous voulions vivre. Lorsque nous avons découvert, sur un marché, le beurre de lait de chèvre qui était utilisé comme baume contre les rhumatismes, nous avons été intéressés immédiatement», raconte-t-il, enthousiaste, les tous débuts de son entreprise. Il était convaincu de pouvoir améliorer ce produit.

Beaucoup d’idées, beaucoup de travail

Les premières années, Hunkeler a du apprendre énormément, non seulement sur les plantes et les produits cosmétiques, mais aussi sur tous les aspects économiques d’une entreprise. « Pour pouvoir acheter les ingrédients de base de nos produits, il nous a fallu fonder une entreprise », se rappelle ainsi Hunkeler les premières années. Avec le temps, l’entreprise a évolué, passant des médicaments aux cosmétiques. D’autres produits s’ajoutèrent, SOGLIO-Produkte devint une SA en 2003. « Mon temps est révolu, ainsi que celui de mon partenaire de longue date Martin Ermatinger. En toute conscience, je peux dire que nous avons aujourd’hui de très bons collaborateurs qui continueront à gérer l’entreprise dans notre esprit. » Quant à lui, il a encore quelques idées à concrétiser, principalement le projet « Stone ». « L’idée est de créer des senteurs particulières à une ville, qui seront vendues dans des flacons de pierre – la pierre provenant de cette ville. » Il cherche encore une personne qui pourrait se charger du projet. Car, âgé de 65 ans, il a assez à faire avec ses animaux et l’agriculture. « Bien sûr, c’est avec plaisir que je fait tout cela, mais ce n’est pas le travail qui me manque », dit-il en souriant.

Source: Bündner Tagblatt – Septembre 2014